La ville de Trilport en Seine-et-Marne est engagée depuis longtemps dans une stratégie d’inclusion numérique portée à la fois par différents acteurs et des événements dédiés. Jean-Michel Morer, le maire de Trilport depuis 2004, développe sa vision d’un numérique pour tous.
Quels sont les principaux chantiers que vous menez dans le domaine de l’inclusion numérique ?
Nous travaillons sur l’inclusion numérique depuis de nombreuses années déjà. Cela correspond même à plus de dix ans de travail et avec la conviction qu’il faut rendre le numérique accessible à tous. Dans un premier temps, nous avons fait un très gros travail dans les écoles. Cela nous semblait important que tous les élèves dans toutes les écoles aient non seulement en main l’outil numérique, mais puissent également en faire un bon usage. Il y a donc eu un travail d’accompagnement des équipes pédagogiques. Nous avons réussi à embarquer les enseignants avec nous dans ce projet. Nous avons créé une commission numérique et éducative au moment où nous avons décidé de rénover toutes les écoles afin de mettre le numérique au cœur de toutes nos actions.
Deuxièmement, nous avons travaillé sur le numérique comme facilitateur de services. Nous avons été une commune pionnière sur tout ce qui concerne les démarches administratives, l’inscription en ligne, le paiement en ligne, etc… Avec également un travail réalisé sur les réseaux sociaux.
Depuis cinq ans, nous candidatons avec succès au label “Ville Internet” qui nous permet de voir où nous en sommes, qui aide à nous évaluer sur le sujet.
Et, enfin, le dernier point sur lequel nous avons travaillé depuis deux ans, avec le plan France Relance et les conseillers numériques, c’est toute la maîtrise des usages du numérique. Nous avons été l’une des premières communes de Seine-et-Marne à accueillir un conseiller numérique.
Est-ce que vous avez des lieux partenaires, des espaces clefs, pour mener des ateliers autour du numérique ?
Nous bénéficions d’un partenariat avec Orange Digital Center qui nous a permis d’entrer en contact avec un FabLab local, MeauxFactory, dans lequel nous faisons de nombreux ateliers, comme par exemple la réalisation d’objets grâce à l’imprimante 3D. À chaque fois, ce sont des actions menées pour tous les publics : séniors, habitants de la ville, avec les centres de loisirs et avec les scolaires.
Nous avons aussi décidé de créer un Tiers-Lieu, car nous avons été lauréats d’un appel à projet de la région Île-de-France, ce qui nous a donné une subvention nous permettant de lancer ce site dédié. Nous sommes en train d’acheter le lieu. L’objectif serait d’ouvrir avant la fin de l’année 2023. Il y aura un premier étage qui sera dévolu aux services municipaux, une grande salle qui pourra accueillir des ateliers, notamment des ateliers autour du numérique, il y aura un espace pour organiser des visioconférences, un espace dédié spécifiquement au coworking et enfin un espace qui sera consacré au numérique, peut-être justement un FabLab.
Aujourd’hui, notre conseillère numérique a déjà deux espaces pour mener ses actions. Elle peut se servir de la salle municipale et, à proximité de cette salle, à 30 mètres, nous avons aussi aménagé un container tout neuf spécialement équipé pour pouvoir l’accueillir. Pour les petits ateliers, dans lesquels la conseillère accompagne deux ou trois personnes, cet espace est l’endroit idéal.
Jean-Michel Morer, maire de Trilport.
Quelle communication mettez-vous en place au sujet de l’inclusion numérique dans la ville ?
Dans une ville comme la nôtre, une ville de près de 6000 habitants, le meilleur vecteur de communication c’est le bouche-à-oreille. Très clairement, nous n’avons pas situé le local de la conseillère numérique près du pôle social par hasard. Il y a un travail de liaison avec le CCAS, c’est un travail transversal qui se fait, parce que c’est cela qui est pour nous le premier vecteur de communication. Ce travail de lien social est mené avec la responsable du CCAS. Il n’y a donc pas de problème de communication. Nous avons par ailleurs lancé une animation auprès des séniors et nous voyons maintenant tout le travail qui a été fait depuis un an grâce à une animatrice qui travaille en lien avec la conseillère numérique. Aujourd’hui, il y a environ 90 adhérents séniors sur ce programme.
Organisez-vous des événements pour mettre en avant l’inclusion numérique ?
Oui, notamment avec le “Numérique Tour” fédéré par la MAIF. Nous avons utilisé le gymnase de la ville pour organiser de nombreux ateliers. Nous en avons fait un pôle d’animation toute une semaine avec plus de 300m2 d’exposition. Nous avons pu faire passer nos 500 scolaires, tous les 6e et 5e du collège, en plus des actions ponctuelles à destination des habitants de la ville. En tout, nous avons eu plus de 3500 visiteurs. Nous l’avons fait l’an dernier et nous pensons l’organiser à nouveau en 2024.
En quoi s’engager pour l’inclusion numérique comme vous le faites est-il un choix politique important aujourd’hui ?
L’exclusion numérique est dommageable, mais aujourd’hui elle devient aussi sociale, culturelle, citoyenne. Toutes les démarches administratives se font via le numérique. Le numérique est devenu le passage obligé. À partir de ce moment-là, alors que la dématérialisation croissante dans les démarches existe, nous devions proposer des alternatives de médiation humaines.
Je crois beaucoup à la fois au risque d’aliénation du numérique, mais aussi aux capacités d’émancipation du numérique. Cela signifie maîtriser les usages pour accéder aux contenus – encore faut-il aller chercher les bons contenus. Et là, c’est tout le travail que nous devons faire, car la fracture est non seulement sociale, mais aussi culturelle. L’enjeu pour nous est donc de faire du numérique un outil d’émancipation qui peut vraiment faciliter l’accès à la culture et qui apporte du “mieux vivre” dans la ville.
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