Organisé chaque année par l’Agence Nationale de Cohésion des Territoires, NEC – Numérique en Commun[s] – est le rendez-vous incontournable de l’inclusion numérique. Prenant cette fois-ci place à Bordeaux, il permet de faire se rencontrer tous les acteurs du secteur et de les fédérer autour de conférences et d’ateliers thématiques. Venus de toute la France, les conseillers numériques sont venus en nombre pour cette journée du 19 octobre qui a su attirer près de 1200 participants. Résumé.
“Construire un parcours de formation continue dans la médiation numérique”, “Technoféminisme”, “Créer un dispositif d’intervention sur la sobriété numérique”, etc. Les thématiques abordées sont riches et s’adressent aussi bien aux conseillers numériques sur le terrain qu’aux décisionnaires. “Le programme est extrêmement intéressant cette année, je vais avoir du mal à choisir” confie un conseiller numérique.
Parmi le programme de la matinée, la conférence sur “Le rôle des (proches) aidants numériques” attire du monde. Longtemps invisibilisés, les aidants – ces personnes qui aident leurs proches pour les tâches de la vie quotidienne – ont été récemment mis en lumière, notamment à l’occasion de la pandémie de Covid-19. Il est estimé qu’aujourd’hui près d’un Français sur cinq serait aidant, soit plus de 11 millions de personnes. Aide médico-sociale, logistique, administrative, les aidants apportent également leur soutien dans le champ du numérique, notamment en ce qui concerne les démarches en ligne. Ce sont d’ailleurs les premières personnes sollicitées en cas de problème dans ce domaine. Mais sont-ils vraiment compétents ? Comment les accompagner ? C’est tout l’objet de cette conférence qui, si elle n’apporte pas de solutions concrètes, a le mérite d’initier une réflexion de fond sur le sujet et de visibiliser cette partie de la population en les intégrant aux feuilles de route des politiques publiques. “Il est essentiel de reconnaître leur rôle, de les valoriser et de leur porter de l’attention” affirme Anna Lebey, cheffe de projet inclusion numérique de Bordeaux Métropole, l’une des intervenantes de la conférence.
Les participants ont eu également l’opportunité d’assister à une autre problématique, elle aussi dans l’ombre : l’illettrisme. L’inclusion numérique entend lutter contre l’illectronisme, mais bien souvent les conseillers numériques sont confrontés à des personnes qui n’ont pas les compétences de base – lire, écrire, compter. Sachant que 95% du contenu numérique est de l’écrit, comment accompagner ces personnes ? Animée notamment par Anne Mességué, coordinatrice à l’Agence Nationale de Lutte contre l’Illettrisme, la conférence présente la démarche DUPLEX qui vise à former les conseillers numériques pour qu’ils soient en capacité d’accompagner ce public. En s’appuyant sur le principe que le numérique peut permettre de développer les compétences de base, la démarche DUPLEX entend faire d’une pierre deux coups en luttant simultanément contre l’illettrisme et l’illectronisme.
La question de l’éthique du numérique était également un thème phare de cette édition. Si la plupart des conseillers numériques ont conscience que la priorité est de former aux compétences numériques de base, ils n’oublient pas pour autant qu’il est également essentiel de véhiculer des pratiques éthiques en prônant un numérique au service des gens, sobre écologiquement et qui ne soit pas subi, mais choisi. L’atelier animé par Framasoft et Hubikoop proposait ainsi de créer un catalogue des pratiques numériques éthiques en se basant sur l’expérience des acteurs de l’inclusion numérique. Logiciels libres, reconditionnement du matériel informatique, sensibilisation à l’utilisation des données personnelles par les GAFAM, aide au choix d’une boîte mail, d’un navigateur et d’un cloud responsables… Le numérique éthique est possible, mais ne peut se faire sans accompagnement. Si beaucoup le soutiennent en théorie, la mise en pratique est plus complexe : “C’est difficile d’inciter les personnes qui sont déjà en difficulté avec le numérique” constate un conseiller numérique pendant l’atelier, “Oui, ça prend plus de temps de les sensibiliser aux outils éthiques, mais la plupart sont gratuits, et pour ce public souvent précaire, c’est plus intéressant pour eux” répond un autre conseiller numérique qui propose déjà des accompagnements sur ce thème. Une question qui était abordée plus tard dans l’après-midi du point de vue des politiques publiques grâce aux interventions des responsables de grandes métropoles (Nantes, Rennes, Bordeaux, La Rochelle et Strasbourg) qui ont récemment adopté des feuilles de route sur le numérique responsable.
Une édition particulièrement engagée vers plus de justice sociale, à laquelle a fait écho le discours du Maire de Bordeaux, Pierre Hurmic : “Nous ne pouvons nous montrer neutres, confrontés aux solutions à apporter concernant l’effondrement climatique, à la destruction de l’environnement, à l’urgence sociale, au maintien et au raffermissement nécessaire de la cohésion et de l’harmonie sociétale. (…) Je sais que Numérique en Commun[s] a inscrit le numérique d’intérêt général à son fronton, et nous verrons tout au long de la journée avec l’ONU, l’Union européenne et l’ensemble des partenaires que cet agenda politique est bien partagé”.
Haut de page